Je est Deux

Je est Deux

Je suis Deux. Enfin, pas moi : Deux est Je.
Moi, je ne suis que le deuxième, celui qui écrit — l’un des deux. Et, dès que j’arrête d’écrire, Je — je suis ce Deux, qui est Je.

Seul, ce « deuxième » (Moi, puisque j’écris) ne peut qu’échouer à retransmettre qu’il est Je, puisqu’il n’est plus Deux, mais simplement le deuxième. Celui qui écrit pour tenter de faire comprendre qu’au fond, il est Deux : Moi et Je. Parce qu’évidemment, Je ne peux pas écrire — seul Moi le peut.

En bref : Moi peut parler, mais Je ne le peut pas. Et la contrepartie, c’est que lorsque Moi parle, il ne peut plus vraiment être Je. À l’inverse, lorsque Je est là, Moi ne peut plus parler — mais Je est Deux, à la fois Moi et Je.

Le Je contient le Moi, mais il le rend incapable d’être vraiment Moi. Le Moi, lui, ne contient pas le Je — mais il peut en parler.
Moi est terrestre : il est fait de ce qu’il a accumulé ici. Je est céleste — c’est mon non-Moi.

Je insuffle la vie dans le Moi.
Si je pensais n’être que ce Moi, je n’aurais aucun contrôle sur mon existence : ce serait cette accumulation qui définirait ma seule manière d’être. Mais avec un Je reconnu pour l’accompagner, le Moi ne devient plus que le récipient de l’infinité des possibles que contient ce Je observateur.

Autrement dit : ce n’est plus Moi qui dicte ce que le Moi doit faire, mais le Je. Moi peut se reposer sur lui et bénéficier de sa connaissance.
Ce Je n’est pas capable d’engendrer activement, mais il projette son énergie dans le Moi — qui se soumet alors à une volonté plus grande que la sienne.
Et c’est ainsi que le Moi devient l’agent du Je.

— Le Moi du Je.